Les poèmes de Maurice des Ulis

Novembre 1996



Fin

Rencontre  La balançoire
Terminus  Bisque, bisque, rage
Au grand air  Ma coquille
Celle qu'on a aimé  Amitié
Retour de chaîne  Câlins ou Ma tigrée
Déclaration  Le poète
Les deux poètes  Un amour de toujours
Tendres épouses  Constatation
Le berger  Etre de glace
Irruption  Questions
Recette 

Rencontre

Rencontre avec Dulia !
J'ai posé mon stylo
Et regardé la lune
Emergeant de la brume
Entourée d'un halo

Et j'y vis ton visage
Empreint de gravité
De grâce et de gaieté :
Tu vais l'air d'un sage.

J'avais aimé ta lettre
Où était exprimé
Avec simplicité
Tes envies et ton être.

J'avais été ému
D'avoir enfin trouvé
Un esprit accordé
Qui m'avait reconnu.

J'ai repris mon stylo
Avec l'appréhension
De trop d'application
Et j'ai écrit ces mots.

Début | Fin

La balançoire

J'ai trouvé dans la rue
Un gamin inconnu
Qui m'a pris par la main,
Et c'était ce matin.

On s'est bien baladés
Dans toutes les allées
Jouant avec les chiens,
Se faisant des copains.

On a joué aux billes
Et regardé les filles
Qui semblaient étonnées,
Enfin on s'est rentrés.

C'est sous la balançoire
Qu'on s'est dit au revoir
Et puis il m'a quitté,
Ce soir je l'ai pleuré.

Début | Fin

Terminus

C'était une journée bien grise
Ou la joie n'était pas de mise
Et les nuages amoncelés
Entre départ et arrivée
Avaient attristé mon regard
A chaque quai de chaque gare.

Entre sommeil et songerie,
Dans cet état d'après minuit,
Je somnolais indifférent
A l'Univers et aux passants
Quand tout à coup je fus surpris :
Car c'était toi, et tu souris.

Morosité exterminée
Et tous mes soucis envolés,
Je succombais à ton regard
Et laissait fondre mes remparts
Devant un monde d'embellies,
De poésies et de folies.

Tu ouvrais pour moi un jardin
De magnolias et de jasmins
Dont tu étais la tutélaire,
La gardienne ferroviaire.
Bientôt le train a ralenti
Puis fut finie ma rêverie.

Début | Fin

Bisque, bisque, rage

Pour faire plaisir à GreenOk, sysop de Vector BBS
J'aime ouïr la foule en délire
Crier mon nom ou me maudire
Et pour une histoire de modem
Hésiter entr'amour et haine.
Alors un petit mot express,
Pour le mail : l'ai pas fait exprès.
Et pour vous faire bien enrager
Bin tiens, je vais recommencer.

signé : le Duo des Nomes

Début | Fin

Au grand air

Il a plu sur la mousse
Et le ciel étonné
En est tout irisé.
Comme la vie est douce.

Une goutte est tombée
Au milieu des orties
Et s'est fait des amies.
J'ai soif de liberté.

Le vent s'est découvert
Une envie de fou-rire
Qui finit en soupir.
Le chant est un mystère.

Les nuages ont pâli
Et rejoint la forêt
En chevauchant les haies.
L'Univers a souri.

Début | Fin

Ma coquille

Je regarde le monde
Du bord de ma coquille.
Quel univers immonde,
Ce peuple qui fourmille !

J'écoute sur les ondes
Des discours qui grésillent
Rêvant derrière mes grilles
A ceux qui y répondent.

J'ai lancé une sonde
Et brisé ma coquille
Avec une brindille
Pour entrer dans le monde.

Un grand soleil inonde
Tous ces objets qui brillent.
Et mes mains qui frétillent
Pour entrer dans la ronde !

Début | Fin

Celle qu'on a aimé

Que c'est dur de quitter
Celle qu'on a aimé
Et penser que la vie
Ne sera plus remplie
De tous ces petits riens
Qui font que tout est bien.

Qu'il va falloir refaire
Le douillet Univers
Où tout à son confort
On n'avait que l'effort
D'exprimer simplement
Les plus doux sentiments.

Et remettre en question
Toutes ses ambitions
Pour à nouveau subir
Un nouvel avenir
Qui aura oublié
Celle qu'on a aimé.

Début | Fin

Amitié

Composé alors que j'écrivais un mail pour exprimer mon amitié à Safari dont l'humeur m'inquiètait
J'ai des choses à te dire
Et je les veux écrire
Car il te faut compter
Avec nos amitiés.

Chaque deuil est terrible
Et nous parait horrible
Pour un amant perdu,
Une amie disparue.

Et c'est là qu'un(e) ami(e)
Qui semblait assoupi(e)
Se révèle soudain
Partageant ton chagrin.

Il faut avoir confiance
En ceux que la chance
A mis sur ton chemin
Pour saluer demain,

Et reprendre le goût,
Quand tu verras le bout,
A ce monde nouveau
Que tu trouveras beau.

Début | Fin

Retour de chaîne

Après le discours de Dulia sur les poèmes érotiques. Icy B l'a trouvé a-BEAU-minable.
Quand je rentre au logis
Epuisé et transis
Il s'approche de moi
Exprimant son émoi
Pour se faire câliner.
Je dois m'exécuter.

Je le prends dans mes bras
Lui murmurant tout bas
Des mots enamourés
Qui le font ronronner.
Alors je le caresse
Et il n'en a de cesse.

Après ce corps à corps
Et quand il est d'accord
Je peux le reposer
Et enfin respirer...
Mais je n'ai pas le temps
Car une autre m'attend.

Début | Fin

Câlins ou Ma tigrée

Etalée sur le lit
Où elle prend des poses
Je sens qu'elle a envie
Qu'il se passe des choses...

Pensive elle m'épie
Se retourne et chavire
Exprimant son ennui
Par un petit soupir.

A la fin, agacée,
Elle s'approche de moi
Et à pas mesurés
Me rappelle à sa loi.

Et voilà tout à coup
Ma raison aux abois,
Sa tête sur mon cou
Met mon coeur en émoi.

Enivré de tendresse
Je la prends dans mes bras
Et lentement caresse
Son corps comme il se doit.

Et quand ma main se glisse
Le long de son échine
C'en est presqu'un supplice
Que sur elle j'anime.

Je la sens qui frissonne,
Rendue au nirvâna.
Tout entière elle se donne,
Je crois qu'elle n'est plus là.

Son corps est comme un luth
Où sonnent les arpèges.
Les notes sont volutes
Et pour elle s'agrègent.

Le temps est reparti
Laissant l'éternité
Qui comme à des maudits
Jure fidélité.

Nous sommes, elle et moi,
Par nos âmes éperdues,
Passés dans l'au-delà
Où rien n'existe plus

Que ma main sur son corps
Se raidissant soudain
Pour un dernier accord,
Pour le dernier refrain.

Mais de tous ces câlins
Elle en a plus qu'assez !
A ses rêves félins
Elle s'en est retourné.

Début | Fin

Déclaration

Par ma timidité
Je ne peux exprimer
A chacun simplement
Un petit sentiment.

Je me sens obligé
Pour pouvoir déroger
De faire le grand tour
Et prendre des détours.

Pour un petit bonsoir
Je prend mon écritoire
Et écris patiemment
Tout un petit roman.

Mes amis déroutés
Ne savent que penser
Et plus d'un se murmure
Que je dois être mûr.

Pour que cesse ce bruit
Et que ce soit bien dit
Je viens donc déclarer
Par devant l'assemblée :

Etant homme de rien
Et n'ayant pas de biens
Pour vous payer ma dîme
Je ne parle qu'en rimes.

Début | Fin

Le poète

Si vous voyez le soir
Devant son écritoire
Un poète penché
En train de s'épancher

Ne venez pas le voir
Et lui dire bonsoir
Ce serait le fâcher
Pour avoir tout gâché.

Attendez patiemment
Et sans murmurement
Que son oeuvre achevée
Il la vienne apporter.

Alors d'un compliment,
Que bien sûr il attend,
Pour le remercier
Vous le pourrez payer.

Puis dégrafez l'armure
Et pansez les blessures
Que la vie a donné
A son âme estropiée.

Et là, dans un murmure
Que votre voix rassure
Cet enfant étonné
D'être en train de pleurer.

Début | Fin

Les deux poète

Je vais vous raconter
En toute honnêteté
L'histoire véridique
D'un haut-fait historique.

Un poète envoya,
On ne sait pourquoi,
Un poème bâclé
A celui d'à-côté.

Celui-ci, ennuyé
D'être si peu prisé,
Lui renvoya pourtant
Un petit mot charmant.

Mais le premier poète
- Où avait-il la tête ? -
Pris mal le compliment
Et parla gravement :

"Me voir ainsi bafoué
Je ne peux supporter
Et je m'en vais céans
Demander jugement !"

Le cas fut entendu,
Le jugement rendu,
Le second condamné,
En une matinée.

Le premier fut ravi
Car la Confrérie
Pour faire son bonheur
Lui rendait son honneur.

Le second, fort aimable,
Fit amende honorable,
Encensant désormais
Ce que l'autre ferait.

Et vous ! A votre avis,
Qui fut le plus marri ?
Le second plus frondeur
Eut pour lui les rieurs.

Car si vous condamnez
Liberté de blâmer,
Vous perdrez sûrement
Le plus beau compliment.

Début | Fin

Un amour de toujours

Je rêve d'un amour
Qui durerait toujours
Où chacun de nous deux
Se sentirait heureux

Que l'on aurait construit
Au milieu de nos nuits
Qu'on aurait décoré
Au gré de nos journées

Un amour de câlins
Où l'on ne fait plus qu'un
Un amour de fureur
Avec haine et rancoeur

Où l'on se sent aigri
Tout plein de jalousie
Et allant voir ailleurs
Chercher notre bonheur

Pour revenir penaud
Ne sachant piper mot
Et voir en son sourire
Un plus bel avenir.

Début | Fin

Tendres épouses

C'est sans vouloir médire
Et pour vous préserver
Que je vais vous le dire
En toute vérité :

De fléau, il n'est pire,
Dans cette société
Où le quidam aspire
A la félicité,

Que de se faire honnir
Par la douce moitié
Qui a sur nous empire
Et même royauté.

Laissez-moi donc redire
Aux nouveaux arrivés :
Il faut éviter l'ire
D'une femme mariée.

Début | Fin

Constatation

Misogynie à part
Et par obligation
Je dois vous faire part
D'une constatation.

Ceux qui ont convolé,
Ce n'est pas un mystère,
Sont un peu empâtés.
Ça je ne peux le taire.

Ceux qui ont résisté
Ont la taille plus fine
Des hommes en liberté
Et aussi bonne mine.

Ils ont le port altier
Et la démarche fière
De ceux qui font rêver
Les belles héritières.

Chaque jour est en fête,
Plein d'opportunités
Pour faire tourner les têtes
Car point ne sont bagués.

Allons, devenez sages,
Les nouveaux fiancés !
Refusez l'esclavage
De ceux qui sont mariés !

Début | Fin

Le berger

C'était un gars charmant
Vivant au praz d'Aignan
Là où les bouquetins
Trouvaient leur picotin.

Il aimait le ciel pur
Et toute la nature
Soignant les animaux
Et mêmes les corbeaux.

Il voyait des bergères,
La démarche légère,
Flâner vers son abri
Pour parler avec lui.

Puis le temps est passé
Et elles se sont lassées,
Le laissant solitaire
Tout là-haut, sur son aire.

Et les filles déçues
De n'être retenues
Dirent qu'il était laid,
Que c'était un fruit blet.

Cela lui fit chagrin
Le long de ses chemins
De voir la vallée
Et les monts l'ignorer.

Mais comme il était sage
Il se mit à l'ouvrage
Décrivant sa bohème
Dans de petits poèmes.

C'est Monsieur le Curé
Qui l'ayant visité
Avait pu tous les voir
Et nous le fit savoir.

Alors à la St Jean
On réunit les gens
Pour aller écouter
Notre célébrité.

Pour la moralité :

A tous les oubliés,
Il n'est point besoin d'or,
La vie est un trésor.

Début | Fin

Etre de glace

De mon igloo j'observe
L'igloo qui me fait face
Cherchant ce que réserve
Cette autre carapace.

Elle ne laisse paraître,
Dessous son air bonasse,
Que l'image d'un être
Dont on ne sait la race.

J'essaye un peu de verve
Pour voir ce qui se passe.
Je crois que je l'énerve :
Elle me fait des grimaces.

Je reçois une lettre
Où elle me dit, hélas :
Ce n'est pas toi le maître
De ce pays de glace.

Je retourne à mes rêves
Où je suis le rapace
Qui patrouille sans trêve
Au-dessus des crevasses.

Début | Fin

Irruption

Le volcan jaillit vivement,
    Impétueux.

Il est demeuré un instant,
    Majestueux.

Il a disparu maintenant,
    Mystérieux.

Son âme est parue lentement,
    Au fond des cieux.

Début | Fin

Questions

Combler cette béance
Venue de notre enfance
Par un amour sincère
Est-il un grand mystère ?

Rencontrer des humains
Pour un bout de chemin
Et puis les voir partir
Est-ce ainsi, l'avenir ?

Avoir un sentiment
Et le trouver géant
Dans un coeur trop petit
C'est ici qu'on grandit ?

Aller courir dehors
Pour chercher un trésor
Et le trouver chez soi
Va-t-il donner la foi ?

Se poser des questions
Avec délectation
Et se ronger les sangs
N'est-ce pas épuisant ?

Et vivre au jour le jour
Sans regarder autour
Ni même écouter l'heure
Est-ce là le bonheur ?

Début | Fin

Recette

Pour écrire un poème
J'écoute ma bohème
Et prends négligemment
  Un sentiment.

Je lui laisse un domaine
Qui le met à la peine
Pour voir s'il va me faire
  Un beau mystère.

Quand il m'a fort ému
Il faut que je remue
Avant l'apparition
  D'une émotion.

Je trempe alors ma plume
Au milieu de l'écume
Et la fais ondoyer
  Pour m'envoûter.

Rappelant mes désirs
Je n'ai plus qu'à écrire
Avec beaucoup de soin
  Le mot de fin.

Début | Fin



Début  |  Mois précédent  |  Mois suivant  |  Présentation  |  Copyright